Page:Octave Mirbeau - Dingo - Fasquelle 1913.djvu/107

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et affalés ; les uns bien vêtus et gras comme des bourgeois riches, les autres couverts de guenilles, maigres et galeux comme des mendiants ; ceux-ci, hargneux, turbulents et batailleurs, ceux-là, bons enfants, calmes et endormis ; tous obscènes, d’ailleurs, offensant la morale, toutes les pudeurs, enfreignant la loi des sexes, publiquement, avec la plus merveilleuse sérénité.

Il y avait des chiens de chasse à poil ras, des épagneuls et des griffons à barbes crottées ; des braconniers aussi qui, sous une apparence de gaucherie débonnaire, dissimulaient leur qualité redoutable. Il y avait des bergers honorables, de respectables gardiens de maisons et de voitures, des rôdeurs et des fricoteurs, des nomades louches dont on ne sait ce qu’ils font et de quoi ils vivent ; chiens sans race et sans métier, ou plutôt bâtards de toutes races, déserteurs de tous métiers, moitié caniches et moitié dogues, faux Danois et faux Terre-Neuve, lévriers courts sur pattes, bassets qui semblaient perchés sur des échasses : caricatures lamentables, réductions bouffonnes de loups, d’hyènes et de lions. Il y en avait dont les faces camuses de bulls anglais s’encadraient de longues oreilles retombantes aux bords dentelés par les chancres ; il y en avait avec de tout petits museaux de rat, enfouis dans d’énormes crinières ébouriffées. Tel roulait, ainsi que