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lui-même, une observation qui ne lui vînt pas des livres ou des autres. Et j’ai beau me souvenir et j’ai beau fouiller mes souvenirs, je ne trouve rien qui mérite d’être retenu. Non, en vérité, rien, rien… rien. Il était si modeste !

Je me hâte de dire que cela ne nuisait pas aux sentiments que j’avais voués à Legrel. Malgré la différence de nos tempéraments, j’avais pour Legrel une amitié qui était maintenant plus que de l’amitié : de la vénération. Je ne me disais pas encore que, lorsqu’on n’aime plus quelqu’un, on prend souvent le parti de le vénérer. C’est plus facile.

Nous fûmes reçus avec l’empressement, la cordialité habituelle. Et Dingo eut tous les honneurs de la réception.

— Dieu ! qu’il est beau !… s’écria Legrel.

— Comme il a l’air doux et intelligent !… dit Mme Legrel.

— Ah ! père… j’en voudrais un comme lui, dit Irène Legrel.

Elle me demanda :

— D’où ça vient-il ces chiens-là ?

— D’Australie, chère petite…

Elle battit des mains ;

— Tu entends, père… d’Australie… Il vient d’Australie… Alors, tu peux bien en demander