Page:Octave Mirbeau - Dingo - Fasquelle 1913.djvu/315

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— Il y a tant de cachettes !… disait-elle émerveillée…

— Mais non… mais non… répondait Dingo… Au jardin, on est surveillé, pourchassé… On n’y a pas une minute de tranquillité… C’est embêtant… Et puis quoi ?… un potager ?… Mais, ma petite, ce n’est bon que pour les végétariens… Écoute… je vais te mener dans le bois… Là au moins on est seul… on est libre… Rien à craindre… Là, il y a de la viande… de la viande de toute sorte… Ah ! tu verras des choses bien plus belles… Viens…

Et Miche le suivait en rechignant. Elle ne le comprenait pas toujours, mais elle avait pour lui — autant qu’un chat puisse respecter quelqu’un ou quelque chose — un certain respect.

Elle marchait derrière Dingo, d’un pas très allongé et très lent, s’attardait aux mille frivolités du chemin : insectes traversant les allées, grimpant aux arbres, bourdonnant dans l’air. Puis tout à coup elle s’arrêtait, inquiète de ce qu’elle voyait, frissonnant au moindre bruit. La peur agitait ses muscles, faisait courir des moires sur sa fourrure. Et sa queue battait l’air en rapides mouvements de fauve. Dès qu’elle eut franchi l’espace familier, elle se mit à miauler sur un ton suppliant, comme pour demander à Dingo de la reconduire à la maison.