Page:Octave Mirbeau - Dingo - Fasquelle 1913.djvu/323

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merle devant elle, en ayant soin de le maintenir du bout de sa patte.

En haut du sorbier, le mâle, affolé, poussait des cris de douleur. Il s’envolait sur l’arbre voisin, puis revenait au sorbier. Il semblait appeler au secours toutes les bêtes cachées, toutes les bêtes libres du bois.

— Eh bien ! dit Dingo… Qu’est-ce que tu attends ? Prends-le… Tue-le !…

Miche ne voulait pas paraître émue. Elle l’était cependant à défaillir. Ses yeux, grands ouverts maintenant, exprimaient, à considérer l’oiseau, comme une volupté profonde, féroce et très douce et brusquement se détournaient de lui avec une indifférence hypocrite.

— Mais tue-le donc… déchire-le… tout de suite… Miche étendit la patte et saisit mollement l’oiseau dans ses griffes. Dingo s’était reculé pour la laisser libre de ses mouvements. Il répéta encore :

— Tue-le donc !…

— Laisse-moi… Tais-toi… Tu détruis tout mon plaisir…

Mais Dingo ne voulait pas se taire… Il expliquait :

— Mais comprends… Comprends donc… Ce qui est amusant, c’est de sentir des ailes frémissantes et qui vous chatouillent la barbe… C’est