Page:Octave Mirbeau - La 628-E8 - Fasquelle 1907.djvu/291

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et je la sens si forte en moi, que je ne veux même pas me demander à qui appartiennent toute cette abondance et toute cette richesse du sol, de l’eau et de la mer, dont la Hollande regorge… Et je ne veux pas savoir, non plus, ce que cache, à Amsterdam, par exemple, cette Bourse toute rouge, dont les murs hauts, les créneaux, les meurtrières évoquent les citadelles de guerre, et les châteaux de rapines d’autrefois.



Nous avons revu le mari de la dame à la chemise… Interrogé par Gérald, le portier nous apprend qu’il s’appelle le comte K…, qu’il est Russe…, délégué au Congrès de la Paix…, enfin quelque chose comme ça… Et il raconte :

— C’est un monsieur pas commode… Il grogne toujours… et d’une violence !… Chaque fois qu’il sort en ville, il a de mauvaises affaires avec quelqu’un. L’autre soir, au théâtre, il a souffleté le contrôleur. Hier, il a pris à la gorge, dans sa boutique, un boutiquier. Ce matin même… monsieur ne sait pas ?… on a eu toutes les peines à l’empêcher de jeter par la fenêtre le valet de chambre de l’étage… Enfin, il a lancé une carafe de vin à la tête du maître d’hôtel… le pauvre diable est très blessé… Il ne peut dire un mot qui ne soit une injure, faire un geste qui ne soit un coup de poing… Le patron voudrait bien le renvoyer… Mais quoi ! il dépense beaucoup… Et ce serait peut-être des histoires… des complications internationales.

— La guerre, parbleu !

— Hé !… on ne sait pas…

Après un petit silence, Gérald demande encore :

— Et sa femme ?