Page:Octave Mirbeau - La 628-E8 - Fasquelle 1907.djvu/357

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bout de six mois d’usage, elle se dérègle, et fait un bruit de ferrailles… et aussi – c’est peut-être ce nom espagnol qui me le suggère – un bruit de castagnettes fort désagréable… Enfin, elle est bonne… On lui doit certains progrès, d’ingénieux dispositifs, dont les constructeurs français ont tiré profit. L’allumage, par exemple, y est excellent ; les roulements en sont célèbres… Tous comptes faits, elle ne vaut pas certainement vos grandes marques, ce qui, avec sa cherté, explique son succès chez vous… Elle ne vaut pas la massive et robuste Panhard, la Renault, la Dietrich, ni l’admirable C.-G.-V., si souple, si endurante et si simple, avec son mécanisme bien portant et joli, le fini merveilleux de son travail, sa régularité de marche si tenace, ses organes toujours frais et ardents, même après les plus folles randonnées… Oh ! je la connais bien !… J’ai l’honneur d’être grand ami de la princesse de Hohenlohe, qui possède deux C.-G.-V. Elle me prend quelquefois à son bord. C’est un enchantement… L’hiver dernier, nous sommes allés du fond de la Silésie – et par quelles routes ! – jusqu’à Cannes, sans accroc… Je rêve de cette voiture-là, qui, par surcroît, est belle comme un bel objet d’art.

— Mais, dis-je, il vous est facile de transformer ce rêve en une solide réalité de cinquante chevaux…

— Non… ce n’est pas facile… répliqua von B… La princesse, elle, parbleu ! est assez grande dame pour qu’on lui permette de se fournir où elle veut… Mais, moi ?… Au Château, mon cher, on voit d’un très mauvais œil, les produits de provenance française… Tenez… la jeune femme du Kronprinz a fait scandale, à Berlin. Vous savez qu’elle a été élevée par sa mère, la grande-duchesse Anastasie de Russie, presque complètement en France. Quatre mois de l’année à Cannes, où les Mecklembourg