résistait, plus il s’exaspérait, car il lui semblait qu’il fallait mesurer à l’entêtement de l’Impératrice l’importance des documents… En réalité, il ne pouvait supporter que, dans la première heure d’un règne si fiévreusement attendu, quelqu’un, si grand fût-il, osât lui résister… La colère emporta cet Empereur d’un jour, jusqu’à la pire démence… Il se dit qu’après tout sa mère n’était qu’une princesse de la maison dont il devenait le chef, la colonelle d’un de ses régiments, sa sujette !… « Eh bien, ordonna-t-il, violet de fureur, vous garderez les arrêts, madame… les arrêts forcés… jusqu’à ce que vous m’ayez obéi… Oui… oui… je vous mets aux arrêts… aux arrêts forcés. » En arrivant, deux heures après, à Potsdam, Bismarck trouve le palais environné d’escadrons de cavalerie en armes. L’Empereur lui apprend comment il vient de répondre à la désobéissance de sa mère… Il est encore très exalté, trouve son idée admirable : « Et qu’elle ne compte pas sur un mouvement de pitié, sur un attendrissement… non… non… jusqu’à ce qu’elle m’ait obéi… vous entendez, monsieur le chancelier ?… jusqu’à ce qu’elle m’ait obéi ! » Le chancelier reconnaissait qu’il eût pris peur, s’il n’avait appliqué toute son énergie à trouver, dans l’instant, des arguments assez forts – et pourtant respectueux – pour empêcher que durât, une minute de plus, cette bouffonnerie macabre, capable de peser sur tout le règne qui commençait. À distance, ce qui l’étonnait encore le plus, c’est qu’il eût pu s’empêcher d’éclater de rire, au nez de son souverain… « Je crois bien, me disait Bismarck, que le jeune homme avait voulu m’épater… Flanquer l’Impératrice… l’Impératrice douairière… l’Impératrice, sa mère, aux arrêts, le jour même de la mort de l’Empereur !… Ça, c’était colossal… kolossal !… » L’élève était allé, comme il arrive,
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