Page:Octave Mirbeau - La 628-E8 - Fasquelle 1907.djvu/73

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Il y a des gens qui croient que Bruxelles, c’est tout à fait la ville.

J’en sais même qui voudraient y vivre, qui regrettent de ne pas y vivre, par exemple ces gais notaires de nos provinces économes, ces financiers bons enfants de la rue Lepelletier qui, actuellement, au Dépôt, à Gaillon, à Poissy, à Clairvaux, se reprochent amèrement de n’avoir pas su mettre au point – au point légal – ces dangereuses opérations de l’abus de confiance et du faux. Mais l’espèce en devient de plus en plus rare. Et depuis la réforme du régime des prisons, préfèrent-ils à Bruxelles ce Fresnes humanitaire, où le confort et l’hygiène ne sont pas illusoires, où le travail semble récréatif et moralisateur, où le modern style des cellules, des préaux, des parloirs, est supportable, sobre, et ne donne pas de cauchemars : la première prison où l’on cause.



On peut ne pas aimer Bruxelles. C’est d’ailleurs le cas de beaucoup de Bruxellois et non des moindres.

Voyez le roi Léopold qui n’y est jamais, qui multiplie les occasions de n’y jamais rester, qui est partout, en France, en Italie, en Suisse, en Allemagne, en Angleterre, qui est en chemin de fer, en yacht, en automobile, mais jamais en Belgique.

— C’est ainsi, confessait-il gaiement, un soir d’Élysée Palace, à un de mes amis, lequel sait parler aux rois, c’est ainsi que j’ai pu garder la vivacité de mon esprit, la sûreté de mon goût, et cette jeunesse qui impressionne tant les femmes… Et puis, que voulez-vous ?… J’ai de si grosses affaires, dans tant de pays…

— Même en Belgique, sire…