cheval, malgré ses défenses furieuses, à trotter docilement. Il fut acclamé par l’assistance et sauva le marché.
Et je me souviens encore de ceci :
Dans une auberge, devant vingt paysans qui l’entouraient et dont la saoulerie barbouillait de taches violacées les mornes faces bestiales, il provoqua, sans raison apparente, un monsieur en paletot, petit propriétaire des environs, qu’on n’aimait pas, parce qu’on ne l’aimait pas… parce que, tombé de Paris un beau jour, il avait acheté, lui étranger, une terre que convoitaient quelques gens du pays. Le marquis fut envers lui grossièrement injurieux et drôlatique. Il l’accabla de traits blessants, d’humiliantes railleries.
— Mais regardez-moi, ce mirliflor qui vient nous épater, nous mépriser avec un paletot ! Est-ce que j’ai un paletot, moi, nom de Dieu ?… Je porte la blouse… la blouse de travail… et la blouse du peuple ! Et je m’en honore.
Timide, étonné, ne comprenant rien à cette soudaine et déraisonnable attaque, le monsieur regarda d’un air effaré ce paletot qui le marquait d’infamie, puis s’enfuit sous les huées des paysans qui, longtemps, se tordirent de rire, bavèrent de rire, crachèrent de rire, s’étouffèrent de rire et de vin, le nez et la bouche enfouis dans leurs verres…
— Je paie une tournée de calvados !… cria