Page:Octave Mirbeau Un gentilhomme 1920.djvu/224

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Pauvre voisin.



Cette année, durant l’été, vint s’établir près de chez moi, dans une petite maison depuis longtemps inhabitée, une sorte de vieux petit bonhomme très propre, très droit, à l’air très doux, très timide, et vers qui tout de suite alla ma sympathie. Oui, ma foi, rien que de le voir, j’avais senti de mon âme à la sienne comme une correspondance d’idées, déjà intime et profonde. Il semblait, tant ses allures étaient humbles, demander pardon de sa présence à toutes les choses, à tous les êtres, à toute la nature. Sur les routes, il s’effaçait, non par crainte, mais par modestie, devant les chiens rôdeurs ; il eût fait certainement des détours de plusieurs kilomètres pour ne pas contrister de son approche un oiseau sur sa branche ou un rat dans son trou. Je fus charmé de la venue, en ce pays, de ce petit bonhomme, dont, sur un premier regard échangé à notre première rencontre, je songeai qu’il