souffre. Non, il n’y a que les restes de vie secrète qui font souffrir. La douleur est dans le vif, et non dans le mort. Plus on meurt soudainement et sans résistance, moins on a de peine. La mort n’est pénible qu’à ce qui la repousse ; c’est l’imagination qui l’exagère et qui en a horreur ; c’est l’esprit qui raisonne sans fin pour autoriser les propriétés ou vies cachées ; c’est l’amour-propre qui vit et qui combat contre la mort, comme un malade a des mouvemens convulsifs à l’agonie. Mais il faut mourir intérieurement comme dans l’extérieur. La sentence de mort est prononcée contre l’esprit, comme la sentence de justice contre le corps. Le grand point est que l’esprit meure avant le corps ; alors la mort corporelle ne sera qu’un sommeil. Bienheureux ceux qui dorment du sommeil de paix !
Quand vous vous abandonnez à Dieu, ne le faites point en raisonnant et en recherchant une certitude intérieure, qui seroit une possession imaginaire contre le véritable abandon ; mais sans présumer aucune inspiration ni certitude, agissez sans retour, suivant votre cœur. Ce qu’on mesure pour se contenter, ou pour s’assurer secrètement sous de beaux prétextes, est un effet de sagesse et d’arrangement ; c’est une borne qu’on se marque pour s’épargner, et en se la marquant, on la marque à Dieu. Plus vous voudrez faire marché avec lui, et en être quitte à moindre prix, plus il vous en coûtera. Au contraire, laissez-lui tout sans réserve ; il vous laissera en paix. De sûreté sensible, il n’y en a dans aucune voie, encore bien moins dans celle de la pure foi. Il faut aller, comme Abraham, sans savoir où. L’épreuve