Page:Oeuvres complètes de Jacques-Henri-Bernardin de Saint-Pierre, Tome 10, 1820.djvu/290

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il leur dédie ses ouvrages; il leur offre un encens qui ne leur est pas indifférent. Rousseau choisit pour son pontife un pauvre vicaire savoyard, et honorant dans ses utiles travaux l'ouvrier laborieux de la vigne, il ne s'indigne que contre ceux qui s'enivrent de son vin. Cependant Voltaire était sensible : il a défendu de sa plume, de sa bourse et de son crédit des malheureux; il a marié la petite-fille de Corneille ; il a usé noblement de sa fortune. Mais Rousseau, ce qui est plus difficile, a fait un noble usage de sa pauvreté : non-seulement il la supportait avec courage, mais il faisait du bien en secret, et il ne se refusait pas dans l'occasion aux actions d'éclat. Les deux louis dont il contribua pour élever la statue de Voltaire, son ennemi, me paraissent plus généreusement donnés que la dot procurée par une souscription des ouvrages du père du théâtre, en faveur de sa parente. Au reste Voltaire avait réellement des vertus. C'est la réflexion qui le rend méchant ; son premier mouvement est d'être bon, disait Rousseau. Aussi ne douté-je pas, d'après le témoignage même de celui qu'il a