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applique le stigmate de saint François. Le muphti ne peut s’empêcher de lui porter envie, et maintenant néanmoins il retourne au palais patriarcal, en se disant : Voudrais-je de ce bonheur-là ?

Assurément il y aurait de la cruauté d’empêcher personne de marcher les talons au rebours, de se donner la discipline, et d’être ravi comme saint Paul au troisième ciel, d’y voir ce que l’œil n’a point vu, et d’entendre ce que l’oreille n’a point entendu. Ce serait un attentat à la liberté, et je prie de ne point calomnier la Lanterne à ce point, que de lui prêter de pareilles intentions ; je déclare au contraire, qu’il doit être permis à qui voudra d’aller à Sainte-Geneviève, à Notre-Dame de Lorette, ou à Saint-Jacques de Compostelle, et même comme le bienheureux Labre, de pousser jusqu’à Jérusalem. Heureux ceux qui croient ! la foi transporte les montagnes ; elle ferait venir la mer jusques à Paris, et nous épargnerait la dépense énorme d’élargir la Seine et de creuser un port, au-dessus du Champ de Mars. Mais cette foi n’est pas donnée à tous, et il est juste que l’Assemblée nationale s’occupe des intérêts de tout le monde. Si le peuple a besoin d’une religion, le philosophe, l’homme sensible et honnête en ont plus besoin encore. Voyez quels efforts ont faits Platon, Cicéron, et Jean-Jacques, pour nous persuader l’immortalité. Nous sommes