Page:Oeuvres de Louis Racine, T1, 1808.djvu/165

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CHANT TROISIEME.

 
Cette ville autrefois maîtresse de la terre,
Rome, qui par le fer et le droit de la guerre
Domina si longtemps sur toute nation :
Rome domine encor par la religion
Avec plus de douceur, et non moins d’étendue,
Son empire établi frappe d’abord ma vue.
Ces peuples que l’erreur rendit ses ennemis,
Contre elle révoltés, à son Dieu sont soumis.
Tout le Nord est chrétien, tout l’Orient encore
Est semé de mortels que ce grand titre honore.
Je vois le fer en main le superbe ottoman
Opposer à ce nom celui de musulman.
Il me semble d’abord que l’un et l’autre en guerre ;
Mahomet et le Christ, se disputent la terre.
Mais de la Mecque en vain le fameux fugitif,
Sous ses bizarres lois tient l’orient captif :
En vain près du tombeau dont Médine est si fière,
Turc, arabe, persan, tout baise la poussière.
Le livre, dont l’aspect fait trembler le turban,
Et qui rend le muphti respectable au sultan,
Que dicta, nous dit-on, la colombe au prophète,
M’apprend qu’il n’est du ciel qu’un second interprète ;
Que le Christ avant lui, premier ambassadeur,
Vint de l’homme tombé relever la grandeur.
Oui, le rival du Dieu que les chrétiens m’annoncent,
Rend hommage lui-même à ce nom qu’ils prononcent.
Ô chrétien,