A celui de l'esprit pourra nous attirer.
Déja notre raison ose tout pénétrer.
Celui dont les bienfaits préviennent nos prieres,
Du salut à son gré dispense les lumieres.
Il confond l'orgueilleux qui cherche à tout savoir ;
Il aveugle celui qui demande à tout voir.
Pour les sages du monde il voile ses mysteres :
Il refuse à leurs yeux les clartés salutaires,
Tandis qu'il les révéle à ces humbles esprits,
A ces timides cœurs, de son amour nourris,
Qui méprisent l'amas des sciences frivoles,
Et tremblent de frayeur à ses moindres paroles.
Un mot eût pû changer les sages antonins ;
Mais ce mot n'est donné qu'aux heureux constantins.
Dieu laisse sans pitié Caton dans la nuit sombre,
Qui cherchant la vertu n'en embrasse que l'ombre.
Mais plus terrible encor il prévoit tous nos pas,
Et vient frapper des cœurs qui ne s'ouvriront pas.
Il verse ses faveurs sur une ame infidelle,
Que l'abus de ses dons rendra plus criminelle.
Jerusalem le chasse, et rejette sa paix ;
Son ingrate Sion refuse ses bienfaits,
Et l'on eût vu par lui Tyr et Sidon touchées
Pleurer sur le cilice et la cendre couchées.
Au grand jour, il est vrai, jour terrible et vengeur,
Sidon sera traitée avec moins de rigueur.
Le serviteur rebelle aux ordres de son maître,
Plus puni que celui qui meurt sans les connaître,
De tous les biens reçus rend compte au Dieu jaloux ;
Mais l'arrêt de Sidon en devient-il plus doux ?
Page:Oeuvres de Louis Racine, T1, 1808.djvu/78
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