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LE LAI DU DERNIER MÉNESTREL

de forcer la porte de sa demeure solitaire. L’été dernier ils l’ont assiégée pendant toute une nuit ; mais ils partirent aux premiers rayons du jour, car ils savaient bien que ses flèches ne manquaient jamais leur but. Le tonnerre a dû gronder bien fort pour le faire sortir de sa tour de Liddel, et je suis tenté de croire que nos ennemis sont commandés par le gouverneur des frontières anglaises en personne.

v.

Il parlait encore quand l’audacieux archer passa sous les voûtes retentissantes du château. Il guidait un petit cheval à longue crinière qui courait comme un cerf à travers les marais et les fondrières, portant la femme et les deux enfans de Tinlinn, dont un serf à demi vêtu composait toute la suite : sa femme robuste, aux sourcils noirs, au visage rubicond, fière de ses colliers et de ses bracelets d’argent, souriait à ses amis en traversant la foule. Tinlinn était maigre et élancé, mais de la plus haute taille. Il portait un morion bossué, et une jaquette de cuir flottait négligemment sur ses épaules. Il avait une hache ; sa lance, longue de six verges d’Ecosse, semblait teinte d’un sang nouvellement répandu, et sa vaillante épouse était chargée de son arc et de ses flèches.

vi.

Il donna en ces termes des nouvelles de l’ennemi à la dame de Branksome : — William Howard marche contre nous, il est accompagné du bouillant lord Dacre ; une troupe nombreuse de lances et des arquebusiers allemands, qui étaient en quartier à Askerten, ont traversé le Liddel comme on sonnait le couvre-feu, et ont incendié ma petite tour. Puisse le démon les en récompenser ! Il y avait plus d’un an qu’elle n’avait été brûlée. L’incendie de ma grange et de ma demeure a éclairé ma fuite, mais j’ai été poursuivi toute la nuit ; John d’Akeshaw et Fergus Grœme m’ont suivi de près, mais je leur ai fait face à Priesthaugh Scragg ; j’ai tué leurs chevaux dans les marécages, et j’ai percé Fergus d’un coup de lance. Je lui gardais rancune