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CHANT SIXIÈME.


mets, les pages se mirent à découper et à servir. Qui pourrait dire le bruit qui régna alors dans la salle, au dehors, et jusque sur la tête des convives ? car les trompettes, les cornemuses et les psaltérions retentissaient dans la galerie. Les vieux guerriers parlaient haut et riaient en vidant leurs coupes sonores ; les jeunes chevaliers, d’un ton plus doux, parlaient à demi-voix aux belles dames qui les écoutaient en souriant. Les faucons chaperonnés, sur leurs perchoirs, battant des ailes et secouant leurs sonnettes, joignaient leurs cris aux aboiemens des chiens de chasse ; les échansons versaient à grands flots les meilleurs vins du Rhin, d’Orléans et de Bordeaux ; tout était joie, bruit et plaisir.

vii.

Le lutin de page, ne perdant jamais l’occasion de faire le mal, voulut profiter du moment où les têtes s’échauffaient, pour semer la haine et la discorde. Conrad de Wolfenstein, naturellement hautain, était mécontent d’avoir perdu quelques-uns de ses coursiers. Le nain lui persuada que le vaillant Hunthill de Rutherford, qu’on avait surnommé Dick Sabre-en-main, les lui avait dérobés. Wolfenstein se prend de paroles avec lui, s’emporte, et le frappe de son gantelet. Howard, Home et Douglas se levèrent aussitôt, et cherchèrent à apaiser cette querelle naissante. Rutherford dit peu de choses et se borna à mordre son gant et à secouer la tête. Quinze jours après, le chien d’un bûcheron trouva, dans la forêt d’Inglewwood, le brave Conrad percé de coups, baigné dans son sang et sans vie. On ne put découvrir comment il avait péri, mais on ne lui trouva plus son sabre, et l’on dit que depuis ce temps Dick porta une lame de Cologne.

viii.

Le nain, qui craignait que son maître ne s’aperçût de ses manœuvres perfides, se rendit alors dans l’office où les principaux vassaux se livraient à la gaieté aussi franchement que les nobles lords dans la salle d’apparat. Wat