Page:Oeuvres de Walter Scott,Tome I, trad Defauconpret, 1830.djvu/299

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CITANT SIXIEME 293

avec amour. A nous aussi cette demeure est bien chère ; comme la Tweed, nous ne la quittons qu’à regret.

Qu’il est juste, cher Heber, de penser à toi la veille de cette joyeuse fête ! que de momens délicieux elle nous rappelle ! Combien de fois n’avons-nous pas écouté ensemble la cloche de minuit ! Suspends, cher Heber, suspends un moment tes graves occupations ; laisse en paix ces volumes classiques que nous ont légués les Grecs et les Latins certainement personne ne les possède mieux que toi ; et sans doute ces anciens, comme disait Ned Bluff, étaient de fort aimables gens dans leur temps ; mais tout change avec les siècles, et la veille de Noël il faut des contes de fées ou de chevalerie…. Profane ! quoi ! abandonner les grandes créations des anciens, leur prose sublime et leur divine poésie, pour suivre dans le royaume de la féerie quelque spectre ou quelque magicien ?….. Non cher, cher Heber ; mais avant de critiquer, écoute ma défense : pourquoi Leyden, hélas ! ne peut-il plus me prêter le secours de son vaste savoir !

Je pourrais te dire que dans le royaume des morts…, Ulysse rencontra l’ombre d’Alcide ; le fantôme de Polydore apparut à Enée sur les rivages de Thrace ; quant à des prodiges, nous voyons dans Tite-Live le locutus bos à chaque page, et ce bœuf parle aussi gravement que s’il criait le prix des fonds publics, ou que s’il tenait à Rome la place d’un membre du conseil commun.

Toutes les nations ont eu leurs présages favoris et leurs traditions populaires. Regarde le paysan de Cambria… Vois avec quel soin il évite Glendowerdy et l’arbre des Esprits ! Interroge ce montagnard dont la claymore conquit la victoire sur les bords de Maida ; il pâlira tout à coup si tu lui demandes le vendredi matin quelque histoire de revenants il craindrait de s’exposer à la vengeance du roi des fées, qui, ce jour-là, quitte sa verte demeure, et, invisible à tous les yeux, se promène au milieu des enfans des hommes.

As-tu jamais, cher ami, passé sous la tour de Franchemont, qui semble suspendue comme l’aire de l’aigle sur la rivière et le hameau ; les paysans racontent que ses voûtes profondes recèlent un riche trésor, fruit des rapines et de la tyrannie du dernier seigneur de Franchemont. Le coffre-fort auquel il est confié est fermé par d’énormes verrous ; près de là est assis un [garde]