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Page:Oeuvres de Walter Scott,Tome II, trad Defauconpret, 1831.djvu/137

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Dans ce moment, Redmond vint les rejoindre ; il s’était occupé avec zèle de tous les préparatifs du départ. Charmé de la généreuse courtoisie de Wilfrid, il lui prit la main et la pressa dans la sienne, jusqu’à ce que son rival attendri lui rendit son étreinte amicale. Il semblait que tous deux s’étaient dit : — Oublions pendant quelque temps notre jalousie, et ne rivalisons que de zèle pour secourir la belle Matilde.

vi.

Aucune parole n’exprima cet engagement mutuel ; ce fut un traité tacite du cœur, une pensée généreuse qui inspira en même temps les deux rivaux. Matilde les devina, et s’aperçut du changement de leurs regards ; elle avait craint de voir éclater les dangereuses querelles d’une jalousie irritée ; cet accord secret lui causa, au milieu de ses disgrâces, une joie au-delà des atteintes du sort ! Tous trois s’assirent autour du foyer hospitalier, et s’entretinrent des espérances d’un avenir plus heureux. Ils s’excitèrent à une aimable gaieté, qui prévint le pressentiment sinistre des malheurs nouveaux dont ils étaient menacés. Doux privilége de nos jeunes ans, qui vaut tous les plaisirs de l’été de la vie ! La flamme brillante du foyer semblait prêter une clarté magique à ce tableau de l’amour. Jamais les traits de Wilfrid n’avaient paru plus animés ; la noire chevelure de Matilde relevait la blancheur de son front et celle de son sein tendrement ému ; le sourire brillait dans les yeux bleus de Redmond. Deux amans demeuraient ensemble auprès de l’objet de leurs vœux, sans s’adresser un regard de courroux. Que cette franchise et cet accord sont rares, grâce aux passions jalouses de l’homme, et à la vanité des fières beautés !

vii.

Pendant leur paisible entretien, un bruit inattendu vint ébranler la première porte du château, et avant que le concierge, dont la vieillesse ralentissait les pas, eût fait les questions d’usage, ou entendit les préludes d’une