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Page:Oeuvres de Walter Scott,Tome II, trad Defauconpret, 1831.djvu/138

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harpe ; bientôt une voix mâle, mais douce, se maria au son de l’instrument harmonieux :

La lune règne à l’horizon,
Mais de vapeurs elle est voilée ;
Il est nuit, et dans le vallon
Il tombe une froide rosée :
Daignez donner dans ce séjour
Un humble asile au troubadour.

Mais le portier sévère répondit : — Éloigne-toi, chanteur vagabond ; le roi a besoin de soldats ; il vaudrait mieux pour toi aller le servir à la guerre, que de faire le lâche métier que tu exerces.

A ce reproche peu encourageant, le ménestrel répondit, comme s’il s’y était attendu :

Ne dites pas qu’au champ d’honneur
Je devrais m’armer de la lance,
Je ne sais que toucher le cœur
En chantant plaintive romance :
Hymne de gloire ou chant d’amour,
Voilà tout l’art du troubadour.

Le vieillard, toujours inflexible, l’interrompit encore : — Eloigne-toi, lui dit-il, va-t’en à la garde du ciel : et, si tu demeures plus long-temps à la porte de ce château, crois-moi, je pourrai t’en faire repentir.

viii.

Wilfrid prit le parti du pauvre ménestrel, et se déclara son protecteur. Ces vers, dit-il à Matilde, ne sont pas sans quelque charme, et semblent prouver que ce n’est point un chanteur vulgaire qui demande l’hospitalité : La nuit est sombre ; ce malheureux aurait de la peine à chercher un autre asile. J’ose m’offrir pour être son garant. Votre Harpool est un peu endurci par l’âge : jadis ce vieux serviteur ouvrait plus promptement sa porte pour recevoir vos amis et secourir l’indigent ; mais aujourd’hui n’a-t-il pas fait des difficultés pour m’ouvrir à moi-même, qu’il connaît depuis long-temps ?