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I

La navigation au moyen des outres est une confidence qui ne peut point nous arrêter. Ce mode de navigation est pour nous tous ici un souvenir d’école, un écho déjà vieux de deux mille deux cents ans. Quinte-Curce, le classique Quinte-Curce, nous a appris à tous que l’armée d’Alexandre de Macédoine a traversé l’Oxus sur des outres[1], et la Seine à Paris nous donne journellement le spectacle de cette navigation primitive[2].

II

L’anecdote héroï-comique de l’immersion de la dame tibétaine et de son sauvetage par un officier anglais doit, au contraire, à mon gré, attirer notre sérieuse attention.

Dans son ensemble, cette aventure porte en soi une valeur ethnique immédiate et réelle. Elle n’est plaisante ici que parce qu’elle est hors de son cadre naturel. La transplantation en modifie l’aspect. C’est une étrangère produite à l’improviste dans un milieu français. Sa gaucherie nous amuse. Il y a là pour nous une illusion d’optique ; nous voyons le plongeon de la dame tibétaine à travers nos sentiments et nos lois. »

  1. Q. Curtius, liv. VII, chap. v.
  2. J’entends parler ici des trains de bois qui viennent à Paris par l’Yonne et la haute Seine.

    La pesanteur spécifique du chêne, surtout du chêne récemment abattu, est supérieure à celle de l’eau ; pour maintenir en flottaison les trains composés de poutres et de poutrelles de chêne, les expéditeurs ont soin d’y attacher sur les flancs et aussi en tête et en queue un certain nombre de barriques vides hermétiquement fermées.

    Je n’ai pas à expliquer l’analogie dans l’emploi des barriques vides et des outres.