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Il en est de même de cette seconde phrase : « la femme épouse et mère n’a pas besoin d’être instruite, » phrase qui n’est qu’une variante de ces quatre vers de Molière,

« Nos pères sur ce point étaient gens fort sensés,
Qui disaient qu’une femme en sait toujours assez,
Quand la capacité de son esprit se hausse
À connaître un pourpoint d’avec un haut-de-chausse. »

Ces lieux communs ont fait leur temps ; aujourd’hui, qui oserait soutenir qu’une instruction solide et sérieuse puisse faire le moindre tort à une mère de famille ?

Sauf de rares exceptions, qu’arrive-t-il dans tous les ménages ? La meilleure, la plus tendre des mères, est forcée de se séparer de son enfant dès l’âge de six ou sept ans pour l’envoyer au collège ; souvent l’enfant est d’une constitution débile, délicate, les soins d’une mère lui seraient indispensables… pourtant ne voulant pas, en vue de son avenir, le mettre en retard pour ses classes, et étant incapable de lui rien enseigner, la mère est obligée de l’enfermer dans une de ces vilaines prisons qu’on nomme un collège, parce qu’il y trouve la science ; mais y trouve-t-il aussi cette tendresse éclairée, cette sollicitude que l’amour maternel peut seul inspirer ; non, c’est impossible, et voilà l’homme qui dès son enfance est exilé de sa famille et apprend à se passer d’elle. Si, comme en Amérique, les femmes recevaient la même instruction que les hommes, celles qui sont vraiment bonnes mères se feraient institutrices de leurs fils, et pourraient ne les envoyer au collège que lorsqu’ils seraient d’âge à pouvoir se passer de leurs soins.