Page:Opere inedite o rare di Alessandro Manzoni, volume III, 1887.djvu/18

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faits appartenant en apparence à un ordre de choses tout autre, des faits, qui, certes, ont une dépendance de vos généralités, mais une dépendance si lointaine, que l’on ne peut la découvrir sans être forcé de reconnaître à ces généralités une grande portée. Il m’est arrivé après avoir lu un des endroits (je suis fâché de ne pas le retrouver pour vous l’indiquer) où vous représentez l’esprit humain révolté contre des synthèses vieillies dans la domination, s’essayant à reprendre par l’analyse la matière que celles-là avaient voulu expliquer et régler, et procédant dans cette opération avec un mélange de hardiesse et d’incertitude, abusant de la nouvelle méthode par la précipitation des conséquences, retombant dans l’ancienne sans s’en apercevoir, et profitant de la disposition de l’ancienne pour la combattre avec des armes dont elle lui reprochait de se servir, etc., il m’est arrivé, dis-je, d’être obligé de suspendre la lecture, pour faire, ou plutôt pour laisser se faire dans ma tête l’application de ce que je venais de lire, à tel livre italien de littérature publié vers la moitié du siècle passé, livre dont on se souvient rarement à présent, mais qui fut, à son apparition, un grand objet de scandale et d’admiration, et auquel j’avais pensé souvent, où j’admirais moi-même un singulier mélange de bon et de mauvais, et dont j’avais été fort embarrassé de donner l’explication, c’est-à-dire l’histoire. Je la trouvais toute faite, je la trouvais involontairement : mutato nomine, de illo fabula narrabatur. Autre fait ; car toutes, les fois qu’un exemple se présentera pour expliquer ma pensée, je m’en fierai plus à lui qu’aux raisonnemens. J’avais dans ma tête et dans mon cœur, comme on dit, un singulier odi et amo pour cette école qui veut réduire la morale à l’intérêt, ou plutôt qui veut tirer la morale de l’intérêt.