Page:Opuscules philosophiques et littéraires. La plupart posthumes ou inédites.djvu/47

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Milord Rochester a bien raison de dire que les Dieux ont mis cette goutte céleste dans le calice de la vie pour nous donner le courage de la supporter.

Il faut aimer, c’est ce qui nous soutient ;
Car sans l’amour, il est triste d’être homme.

Si ce goût naturel, qui est un sixième sens, le plus fin, le plus délicat, le plus précieux de tous, se trouve rassemblé dans deux ames également sensibles, également immuables, également susceptibles de bonheur et de plaisir, tout est dit, on n’a plus rien à faire pour être heureux ; tout le reste est indifférent. Il n’y a que la santé qui y soit nécessaire ; il faut employer toutes les facultés de son ame à jouir de ce bonheur ; il faut quitter la vie quand on le perd, et être bien sûr que les années de Nestor ne sont rien au prix d’un quart-d’heure d’une telle jouissance. Il est juste qu’un tel bonheur soit rare ; s’il étoit commun il vaudroit mieux être homme que Dieu, du moins tel que nous pouvons nous le représenter. Ce qu’on peut faire de mieux est de se persua-