Page:Opuscules philosophiques et littéraires. La plupart posthumes ou inédites.djvu/52

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juste pour sentir qu’il n’y avoit peut-être au monde que mon cœur qui eut cette immutabilité qui anéantit le pouvoir des tems ; que si l’âge et ses maladies n’avoient pas entièrement éteint ses desirs, ils auroient peut-être encore été pour moi, et que l’amour me l’auroit ramené ; enfin que son cœur incapable d’amour, m’aimoit de l’amitié la plus tendre, et m’auroit consacré sa vie. La certitude de l’impossibilité du retour de son goût et de sa passion, que je sais bien qui n’est pas dans la nature, a amené insensiblement mon cœur au sentiment paisible de l’amitié, et ce sentiment, joint à la passion de l’étude, me rendoit assez heureuse.

Mais un cœur si tendre peut-il être rempli par un sentiment aussi paisible et aussi foible que celui de l’amitié ! Je ne sais si on doit espérer, si on doit souhaiter même de tenir toujours cette sensibilité dans l’espèce d’apathie à laquelle il a été difficile de l’amener.

On n’est heureux que par des sentimens