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LA PLACE DES LICES

chair corrompue lorsque les membres pourris se détachaient du corps et tombaient par terre.

À l’heure actuelle, on trouve encore des os humains dans ce champ, qui porte le nom de Champ de la carrée. Il était autrefois entouré de murs formant un carré et appelé par ironie Roque mignon (grimpe mignon).

On nous y a conduit, il y a quelques jours, et nous y avons vu un péroné et une vertèbre. Une paysanne nous a dit y avoir trouvé une tête de mort il y a peu de temps.

Une dame — digne de foi — décédée à Saint-Hélier en 1870, à l’âge de 86 ans, racontait souvent avoir vu les squelettes de sept pendus se balancer aux branches des arbres de Roque mignon.

M. Dupont, ancien receveur d’octroi du bureau de Saint-Hélier, se souvient avoir vu des poulies au haut des arbres du champ des pendus, poulies qui avaient servi à hisser les cadavres.

C’était aussi sur les Lices qu’on rouait les condamnés. On leur brisait les membres les uns après les autres et le bourreau leur donnait le coup de grâce en leur défonçant la poitrine avec une barre de fer.

Le dernier ainsi martyrisé fut un bas-breton qui avait commis un crime horrible.

C’était un enfant naturel. Un jour il demanda à sa mère où était son père. Elle lui répondit qu’il n’en avait pas.