— Ce n’est point un conte que je vais vous faire, commença-t-il, c’est une histoire véridique que je tiens de mon grand-père, qui était chantre à l’église de Saint-Erblon, et qui savait lire dans tous les livres, pieux et autres.
Or donc, longtemps avant que le grand chemin de Rennes à Nantes fût fait, vivait, à la ferme des Noyers, en Orgères, une jeunesse d’une rare beauté, qui croyait en Dieu et secourait son prochain. Ses gens[1] qu’elle affectionnait ainsi que tout enfant doit le faire, comme de juste, l’aimaient au point de ne jamais rien entreprendre sans la consulter. Du reste, faut l’avouer ; elle était sage et entendue pour son âge, car elle comptait à peine dix-sept ans, quand on lui proposa de s’établir[2].
Fraîche comme la fleur dont elle portait le nom, Rose Landelle n’était point vaine de sa personne et ne faisait les yeux doux à aucun, ce qui ne l’empêchait pas d’avoir un grand nombre d’amoureux. Les galants venaient de plus de dix lieues à la ronde, tant la réputation de la fillette s’étendait au loin.
Cependant il y en avait un plus assidu et mieux accueilli que les autres. Il était du bourg de Chanteloup et s’appelait Pierre Sauvage. C’était un brave jeune gars, courageux et bon chrétien,