Page:Oraison funèbre de très haute et puissante Dame, Madame Justine Pâris, 1884.djvu/25

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jamais femme n’avait encore eu l’honneur de le mettre aux abois.

Nouvel Anthée, ses chutes semblaient lui donner de nouvelles forces : on eût dit qu’il sortait du combat toujours reposé, toujours frais, toujours neuf.

Déjà les compagnes de l’incomparable Justine avaient été défaites par ce superbe vainqueur.

Elle s’offrit à son tour avec confiance sur le champ de bataille ; une nuit entière elle soutint les assauts de l’impétueux musulman.

Enfin, elle l’attaqua elle-même ; le pressa, le terrassa, l’anéantit : le taureau turc baissa sa lance, il s’avoua vaincu.

Quel triomphe ! mes chères filles ! cette mémorable action fut gravée, en caractères d’or, dans les fastes de Cythère.

Mais qu’un grand nom est un pesant fardeau ! il attire à la fois et l’admiration et l’envie.

Justine, l’incomparable Justine ne l’éprouva que trop.

Elle fut obligée de quitter un séjour où la jalousie empoisonnait sa gloire et son bonheur ; elle résolut de voyager.

Paris (et il n’y a qu’un Paris dans le monde), Paris ne devait pas posséder seul une si rare merveille.

Plusieurs nations furent les témoins de ses exploits. Les héros les plus fameux de l’Europe luttèrent tour à tour contre elle et furent défaits.

L’incomparable héroïne de Cythère, Paphos, Amathonte, parcourut l’Angleterre, l’Italie, l’Espagne, l’Allemagne, la Suède, la Russie, tous les pays du Nord et du Midi.