Page:Oraison funèbre de très haute et puissante Dame, Madame Justine Pâris, 1884.djvu/38

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sa voisine, et c’est de chez lui que pénétraient chez elle les Princes, les Prélats, les gens à simarre, les Dames de haut parage, qui avaient besoin d’une manière ou d’autre des exercices de l’exécrable Gourdan.

Au moyen de cette introduction furtive, et que les domestiques même ignoraient, on changeait, comme l’on voulait, de décoration en ce lieu.

L’Ecclésiastique pouvait se transformer en séculier, le magistrat en militaire, et se livrer ainsi, sans crainte d’être découverts, aux honteux plaisirs qu’ils y venaient chercher.

Les femmes cachant également leur grandeur et leurs titres sous la bure d’une Chambrière, ou dans les cornettes d’une Cauchoise[1], recevaient hardiment les vigoureux assauts du rustre grossier que leur avait choisi leur experte confidente pour assouvir leur indomptable tempérament. De son côté, le paysan grossier, croyant caresser sa semblable se livrait sans s’effaroucher, à toute l’impétuosité de son ardeur brutale.

De là, je passai avec mon conducteur dans l’infirmerie.

Que ce mot ne t’épouvante pas, cher Eustache ; il n’est point question de maladie pestilentielle, mais de ces voluptueux blasés dont il faut réveiller les sens flétris par toutes les ressources de l’art de la luxure.

Ce lieu ne recevait le jour que d’en haut, ce qui le rendait plus tendre ; de toutes parts on ne voyait sur les murs que des tableaux, des estampes lubriques ; ces attitudes, ces postures lascives, inventées pour allumer l’imagination et ranimer les désirs étaient répétées en sculpture, et les morceaux les plus ordu-

  1. (D) Femmes du pays de Caux, en Normandie, qui conservent à Paris ordinairement le costume très-remarquable de leur province, et qui contribuent beaucoup, comme gentilles et disposées au libertinage, à recruter les bordels de la Capitale.