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^ LE SYMBOLISME ^

ceur de cet après-midi de mai, « ce brouillard clair qui sent bon les jeunes baies », car c'est cela qu'il sent, et rien autre. C'est cette précision, cette propriété du terme qu'il fallait emprunter à Verlaine comme à tous les grands écrivains, car le français ne souffre pas les à peu près, même grandioses ; ce sont ces noms vrais de fleurs et d'oiseaux qui manquent aux plus grands, à Hugo plus qu'aux autres, dont les forêts ont tou- jours l'air d'un temple aux piliers non équarris, où l'on respire ce qu'on veut, excepté l'herbe et le sous- bois.

Ce qu'il fallait demander à Verlaine, au Verlaine qu'il faut imiter, c'est l'ingénuité de sa foi — la foi en n'importe quoi, malgré notre attachement person- nel au catholicisme — c'est la ferveur de son amour. Dans un cœur ravagé d'une pareille flamme, l'expres- sion naîtra d'elle-même, plus ou moins correcte selon votre culture, mais jamais banale, faible ni impropre. Cela ne s'acquiert pas dans les estaminets littéraires et l'enthousiasme n'est pas un produit de la fumée des pipes. Il me semble qu'un être jeune, à 1 âge où les émotions sont naïves et profondes, lisant Sagesse ou les Fêtes galantes ou la Bonne Chanson, suivant son goût naturel, et qui sentira son cœur déborder, qui emportera dans sa mémoire un vers qu'il remâchera tout un jour comme une violette acre et douce, rendra plus hommage à Verlaine, sera plus près de ressembler à sa poésie que celui qui alambi-