Page:Ostwald - L’Évolution d’une science, la chimie, 1909.djvu/130

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quement, et le monde chimique dut envisager le fait qu’il pouvait exister des corps de même composition doués de propriétés différentes, sans pourtant qu’il fût possible de passer simplement de l’un à l’autre, comme pour l’eau et la glace par exemple.

Berzélius s’accommoda de cette découverte avec sa maîtrise habituelle. Son prestige tenait essentiellement à ce qu’il savait établir des relations entre les différents faits qui se présentaient au jour le jour, et exprimer, sous une forme susceptible de développement, ce qu’il y avait en eux de général et d’essentiel. Dans le cas présent, il fit preuve de ce talent d’une façon si brillante que les idées créées par lui ont duré jusqu’à nos jours, et que les noms qu’il a proposés resteront encore longtemps en usage.

Berzélius n’a pas fait rentrer d’un seul coup tout ce nouveau groupe de faits dans un cadre scientifique régulier. Après s’être bien assuré qu’aucune méprise n’avait pu être commise relativement à l’identité de composition, il déclara qu’il fallait renoncer à ce principe, que les mêmes propriétés correspondent toujours à la même composition centésimale brute. Partisan convaincu de l’hypothèse atomique, il expliqua bientôt la différence observée par un assemblage différent des mêmes atomes. Cette idée fut peu de temps après exprimée par Dumas, qui signala l’allotropie des éléments (charbon, graphite et diamant, ou phosphore rouge