Page:Ostwald - L’Évolution d’une science, la chimie, 1909.djvu/139

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

temporains et ils en souffrent, car on ne les comprend pas, et on ne veut pas les suivre : le principe de l’inertie fait toujours rejeter ce qui modifierait brusquement le cours habituel des idées. Puis il arrive que les théories nouvelles ont du succès, et que la jeunesse les accepte, car l’inertie a sur elle moins de prise ; la jeunesse n’a pas encore d’habitudes, elle possède pour un travail nouveau de plus puissantes ressources d’énergie ; elle s’attache à un guide et un grand mouvement fait entrer les idées nouvelles dans la science. Ensuite cette jeunesse manifeste son activité d’une façon plus marquée ; le guide a dû dépenser auparavant toute son énergie pour frayer la voie et écarter les grands obstacles ; au prix de ses meilleures forces, il a ouvert le chemin jusqu’à un point que ses disciples atteignent de leur côté avec des forces fraîches, tout prêts à avancer encore. Ce dernier mouvement est d’autant plus puissant que les idées nouvelles étaient meilleures et plus fécondes, et ces idées, qui étaient d’abord la création personnelle du pionnier d’avant-garde, commencent de vivre d’une vie propre et indépendante. Il est inévitable que le souffle manque finalement à cet homme, tandis que la science poursuit son chemin sans arrêt. Dans ses jeunes années, en y employant toutes ses forces, il a mis en mouvement le char de la science, et, dans la seconde période, la poussée des jeunes collaborateurs en accélère tou-