Page:Ostwald - L’Évolution d’une science, la chimie, 1909.djvu/318

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

quels sont les obstacles qui s’opposent à la généralisation de la conception nouvelle.

Les grandes découvertes des sciences de la nature amènent toujours une transformation profonde dans les conceptions et les modes de raisonnement philosophiques. Il est facile de montrer l’influence des découvertes de Galilée, de Kepler et de Newton sur la philosophie du xviiie et du xixe siècle. C’est un véritable processus de diffusion : ce sont les domaines les plus voisins qui sont atteints les premiers ; un domaine est-il éloigné, il subit d’autant plus tard l’influence de la pensée nouvelle.

Aussi, l’influence de toute idée scientifique dans son domaine spécial garde-t-elle une avance caractérisée sur son influence philosophique. Celle-ci ne se fait sentir souvent que lorsque la science spéciale est tellement familière avec ces nouveaux points de vue qu’elle les range parmi les notions qui vont de soi, c’est-à-dire parmi celles dont on ne se préoccupe plus.

Une particularité complique cette action réciproque. Le savant spécialiste (sauf quand il s’occupe de philosophie proprement dite) ne s’inquiète guère des considérations philosophiques générales qu’il utilise pour systématiser ses recherches, car ces idées ne semblent pas rentrer essentiellement en ligne de compte. Non seulement la science spéciale s’assimile tardivement les conceptions philo-