Page:Ostwald - L’Évolution d’une science, la chimie, 1909.djvu/338

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lière des mouvements atomiques. Ceux-ci devaient avoir une certaine grandeur et une certaine direction ; c’est ainsi que la théorie cinétique donna lieu à nombre de questions dépourvues de signification expérimentale ; elle fut la source de problèmes apparents (Scheinprobleme), suivant l’heureuse locution de Mach. Ce sont des problèmes d’une nature singulière : une puissance surnaturelle aurait beau nous en livrer la solution, nous ne pourrions en rien faire, car il n’y entrerait pas de grandeurs observables[1].

Au contraire, l’extraordinaire généralité du concept d’Énergie a pour effet de ne permettre l’introduction d’aucun problème apparent. Rencontrons-nous un phénomène calorifique, le principe de la conservation de l’Énergie ne nous donne pas d’explication sur sa nature « intime », mais nous pouvons énoncer à l’avance qu’à toute modification calorifique correspondront des modifications parallèles des énergies voisines ; nous en calculerons le taux à l’avance, connaissant le taux du changement calorifique. Nous pouvons même prévoir des propriétés caractéristiques de cette quantité particulière d’origine calorifique qu’on appelle la tem-

  1. C’était vrai au temps où j’ai écrit ces lignes. Depuis lors il est devenu possible d’observer et contrôler quelques conséquences de l’hypothèse cinétique, et on les a trouvées concordant avec l’expérience. Ce progrès changea le problème apparent en un problème réel.