Page:Otlet - Monde - 1935.djvu/244

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L’Italie s’est agrandie des terres irrédentes : à la voix de Mussolini, elle a tendu la musculature relâchée de son organisme. Par des moyens que la liberté condamne, elle a opéré une extraordinaire révolution intérieure, étant devenu un corps commandé par une âme, et une machine orientée vers des fins conscientes. Incontestablement l’Italie a grandi. L’Empire Britannique, vaste République Fédérative couronnée, a vu ses Dominions croître extraordinairement en force et en indépendance, tandis que vieille nation mère, qui crut aux bienfaits sans fin de l’individualisme concurrencier, la Grande-Bretagne a faibli ; elle est passé d’un conservatisme désormais impossible à un travaillisme largement venu trop tard et qui sent la nécessité d’une refonte mais sans trop de heurts, partant sans trop de précipitation ni de systématisation. L’Empire devient une réalité économique après Ottawa. Voici la France ; elle est la victorieuse et son prestige de Versailles fut grand quand elle voulut donner dans le palais de Louis XIV un spectacle où la République pouvait vraiment dire : maintenant, « l’Etat c’est moi » ; elle montra qu’elle n’était pas insensible aux gloires du passé, tout en acceptant, désormais satisfaite, de les prolonger par des mesures pacifistes. Mais avec un empire colonial non homogène, une population de sang originaire toujours plus réduite, avec une langue véhicule de son influence extérieure de plus en plus concurrencée par l’anglais et par les petits parlers nationaux, avec, dans la masse de son peuple, une ignorance par trop grande de l’heure qu’il est dans le monde et des rôles qu’il est encore possible d’y jouer, — la France apparaît grande sans doute, et sympathique, et gardienne d’un grand trésor de culture, mais cependant impuissante à être un peuple chef. Elle est trop traditionnaliste encore dans ses couches fondamentales et peu inclinée à mettre en formule universelle l’idéal nouveau développant et dépassant 1789. Quant au Japon, là-bas en Extrême-Orient, il a grandi considérablement ; il n’a en rien souffert de la guerre, n’y ayant assisté qu’en allié spectateur, mais son organisme intérieur a évolué en force. Au mépris du droit de la Chine, il s’est emparé de la