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LE VISAGE DU MONDE POLITIQUE A CHANGÉ.


1914-1934. — Vingt années séparent ces dates, durée qui est moins que rien dans l’Histoire humaine et l’évolution de ses destinées. Mais combien remplie ces vingt années par un développement qui fit passer le visage du monde de ce qu’il était à la veille de la grande guerre, à ce qu’il est devenu et surtout en train de devenir. Établir un parallèle entre les deux années rien ne donne sensation plus directe de l’immense processus dans lequel toutes les forces sont engagées.

Il y avait au point de départ de la comparaison huit grandes puissances et c’étaient elles qui conduisaient toutes choses, se conduisant elles-mêmes en orgueilleux prototypes de toute existence à un degré supérieur, s’érigeant en modèle envié par les moyens et les petits États. Un même souffle les animait : l’impérialisme. Pour certains, l’impérialisme était à double face : extérieure et intérieure et les institutions y étaient encore de la nature du pouvoir absolu ou à très près. Maintenant l’Empire de toutes les Russies, le plus conquérant et le plus despotique de tous, est remplacé par la République U. R. S. S., après que la Pologne, la Lettonie, l’Esthonie, la Lithuanie, la Finlande en eurent été détachées par des mouvements populaires reconnus à Versailles. Et l’U. R. S. S. édifie continuellement le socialisme. L’empire d’Autriche a volé en éclats et plusieurs de ses morceaux sont érigés en républiques dont l’une, la Tchécoslovaquie, est tout à fait remarquable par sa force tranquille et son élévation intellectuelle. Quant à l’empire d’Allemagne, après restitution de l’indu, il est devenu république, puis troisième Reich, poursuivant à travers des crises des transformations compliquées, largement socialistes et communitaires, mais où sous l’action de la rationalisation et de l’organisation, quand même une forme nouvelle d’État à large assise économique est en voie de s’édifier. Mais l’Allemagne réarme et si le nazisme peut correspondre à un état d’âme germanique, il est incompréhensible pour l’esprit latin ou anglo-saxon.