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moi est conscient et inconscient. L’esprit est comme le spectre : il a des extensions invisibles (inconscientes), avec des caractéristiques propres aussi importantes à étudier que les régions visibles (conscientes).

Le moi, c’est l’introspection avec notamment les grands philosophes, les grands psychologues qui en ont fait avancer la connaissance ; avec les grands romanciers et ces géants parmi eux, les Russes Tolstoï, Dostoiewski.

Chaque individu a un comportement intérieur et extérieur : connaissance de l’objet perçu et jugement sur lui, sentiment et réaction, après délibération intérieure, volonté et action. Les opérations à peu près simultanées et comme trois aspects d’une même chose : position de la moindre résistance, se comporter selon l’immédiat ; position selon l’idéal, se comporter comme si chacun de ses actes collaborait à la réalisation de l’œuvre universelle toute entière.

La connaissance acquise n’est pas seulement une image du réel qui vient se superposer à ce que nous sommes, un contenu nouveau qui simplement s’introduit dans un contenant. C’est notre être substantiel lui-même que la nouvelle connaissance pénètre, modèle et transforme. De ses études universitaires un jeune homme sort modifié entièrement, le voyage fait des êtres neufs, une lecture renouvelle.

Du rapport du moi et du non-moi, de l’étude de la sensibilité considérée comme le rapport de deux activités, il résulte ces deux axiomes : 1° nous voyons la réalité, non comme elle est, mais selon ce que nous sommes ; 2° il est impossible de retenir et de recopier une forme ou une couleur si on n’y attache pas une interprétation quelconque, car en même temps qu’on voit, on juge. La réalité en art est le rapport réalité-idée. Il y a dans chaque cas, partant et à tout moment, à connaître l’équation personnelle (sujet : objet).

La conscience peut s’élargir de cercle en cercle. Après la conscience individuelle, sociale, locale et nationale, la conscience mondiale.

L’horrible prison en laquelle est enfermé le moi, qui ne s’épand et ne vit hors de lui-même : le moi de ceux