Page:Otlet - Problèmes internationaux et la guerre.djvu/114

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

hindoue ou chinoise meurent de faim par milliers, grouillant sur une terre nourricière ingrate, dont, le sol épuisé ne peut plus les nourrir[1].

3. Les coefficients comparés de natalité (augmentation annuelle par mille habitants) sont pour quelques pays : Russie, 44.2 ; Autriche, 34.8 ; Allemagne, 23.7 ; États-Unis, 27.2 ; Royaume-Uni, 24.3 ; France, 18.9. Ainsi non seulement la densité de l’Allemagne et de l’Autriche est beaucoup plus grande que celle des autres pays, mais la natalité y est plus forte qu’en Angleterre et qu’en France. La conséquence sera un accroissement de densité plus rapide dans les premiers pays que dans les seconds. La natalité plus forte de la Russie est compensée par sa plus grande mortalité.

Les différences dans la natalité et dans la mortalité apportent des modifications profondes dans la situation relative des différents peuples à des époques différentes. Actuellement la natalité décroît presque partout. En France, de 1850 à 1912, elle est tombée de 27 à 19 par 1000 habitants. En Angleterre elle est tombée dans le même laps de temps de 33 à 25 ; en Allemagne de 38 à 30 ; mais dans ces pays la baisse est toute récente. Dans les États de l’Australie, le taux, qui était de 40 par 1000 en 1870, est tombé à 27. Et pour les anciens états des États-Unis les taux seraient presque au même niveau qu’en France si la forte natalité des émigrés ne relevait la moyenne.

Si la France avait accru sa population d’un pas égal à ses voisines, elle aurait eu maintenant 66 ou 67 millions d’habitants. L’Allemagne n’aurait pas attaqué un tel pays. Il n’eut pas été nécessaire d’ailleurs de rechercher l’alliance russe pleine de complications et de dangers. Les relations de la natalité et de la guerre sont directes. la France a payé cher ses fausses idées sur la natalité, ne voulant pas en général partager les fortunes entre plusieurs enfants. Il lui a fallu accepter un dur temps de service de trois ans à cause du manque de soldats. Ses villes ne se sont pas renouvelées, ses industries ont végété, offrant un libre champ à la concurrence allemande[2].

Après la guerre il faudra combler les vides de la population. Les gouvernements chercheront à stimuler la natalité par tout un ensemble de mesure dont déjà on s’entretient. On entrevoit la procréation obligatoire pour satisfaire le Moloch État[3].

La science (eugénisme), elle, tend à ces deux conclusions : 1° La fécondité des espèces varie en raison inverse du développement des individus ; 2° Il est absurde de mettre au monde de grandes troupes de

  1. Jean L’Homme, En 1916, p, 108.
  2. Ed. Heberlin, Doit-elle mourir ? Étude sur la régression de la natalité en France. — Ch. Richet, La dépopulation de la France, Revue des Deux Mondes (15 mai 1915). — A. Girault, La diminution de la population adulte mâle en Europe et ses conséquences économiques et sociales (1915).
  3. Jean Signorel, La répression de l’avortement (La guerre aux ennemis du dedans.) Revue politique et parlementaire (10 juillet 1915).