chèrement payés, quel que soit le vainqueur ; ils lui auront fait courir le risque capital d’une défaite possible et ces mêmes avantages auraient pu être obtenus autrement et sans la guerre. La sottise qu’a faite l’Allemagne au point de vue économique en faisant la guerre paraît énorme. Elle a arrêté net sa conquête pacifique. Elle s’est fait chasser du territoire des alliés et a mis en garde tous les neutres contre ses procédés d’accaparement dévoilés. Elle à aussi créé chez les neutres une recrudescence de nationalisme économique. Or les importations allemandes chez les alliés étaient de 2.933 millions de francs en 1903 et de 5.741 millions en 1913, soit en dix ans un doublement. Dans un régime universel de libre contrat, l’amélioration économique d’un pays a plus à gagner de bonnes relations avec les autres peuples que de la mise en œuvre d’une politique impérialiste (exemples de la prospérité économique des petits peuples tels que les Belges, les Hollandais, les Suisses).
Quant à la deuxième théorie, celle de la solidarité économique obstacle à la guerre, elle s’est trouvée en défaut, mais elle demeure vraie en partie : cette solidarité a longtemps retardé la guerre universelle. Les hostilités auraient pu éclater en 1911 lors des affaires du Maroc. On a généralement attribué alors au monde des affaires une influence anti-guerrière décisive. Au demeurant la solidarité économique, rendue sensible par les événements, est le fondement le plus sérieux d’une construction de la paix pour l’avenir.
2. Le principe de l’économie moderne se dresse en opposition directe avec le principe de la guerre. Celui-ci réside en une destruction de richesses, à la fois pendant qu’elle se prépare et pendant qu’elle se fait, et en une appropriation du bien d’autrui sans compensation. Le principe du commerce est, au contraire, basé sur l’épargne du capital, sur la conservation des richesses en quelques mains qu’elles se trouvent et sur le principe de l’échange, c’est-à-dire de la substitution d’une utilité et d’une valeur à une autre.
3. De tous temps le commerce a joué un rôle considérable dans l’histoire de la politique. Dès les débuts de la société policée le souci des intérêts du négoce a dicté pour nombre de gouvernements la ligne de conduite qu’ils adopteraient au milieu des complications et des luttes. Les questions purement commerciales et industrielles sont devenues politiques dès cette époque lointaine. Il y a donc eu de nombreuses guerres économiques. Citons pour mémoire les milieux sociaux ou la guerre existe à l’état endémique, parce que le pillage forme un de leurs moyens d’existence. Ainsi les razzias des Arabes qui veulent compléter leurs ressources insuffisantes du désert, les incursions des populations habitant des steppes pauvres qui confinent à des régions cultivées, comme ce fut le cas des peuplades pour se protéger desquelles les Chinois ont construit leurs fameuses grandes murailles.