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« Allez, enseignez toutes les nations. » « Tous, dit saint Jean Chrysostôme, nous sommes membres d’un seul Jésus-Christ. » Bossuet dit : « L’Union des hommes doit être fondée, non sur la nation, mais sur l’humanité en général. » L’Église enseigne le dogme de la « Communion des saints ». Les saints ce sont tous les vrais fidèles, du ciel, du purgatoire et de la terre ; ils sont indissolublement unis entre eux : peu importe leur nationalité terrestre[1].

« Qui sait, disent des hommes religieux d’aujourd’hui, si le ciment religieux ne faciliterait pas une Union mondiale des États. La conception trop purement humaine d’une telle Union n’aura jamais les mêmes chances de durée que si une part de divin entre dans l’intention et dans les faits de cette conception. »

262.8. IRRÉLIGION ET LAÏCISATION. — À côté de tous ces mouvements religieux, parallèlement à eux, s’effectue le grand mouvement de rationalisation, de laïcisation, d’irréligion qui emporte le siècle. Que d’Églises ne sont plus que de pure façade ! Que d’hypocrisie dans le personnel ecclésiastique de beaucoup de pays ! Que d’indifférence religieuse et d’atrophie spirituelle parmi les fidèles[2] ! « Le christianisme, dit H. Taine, s’est réchauffé dans le cloître et refroidi dans le monde. La foi a augmenté dam le groupe restreint et diminué dans le groupe large ».

1. Les gouvernements primitifs sont presque tous théocrates. En Grèce et à Rome les tendances temporelles prédominent. La religion qui avait enfanté l’État, et l’État qui entretenait la religion, se soutenaient l’un l’autre et ne faisaient qu’un. Ces deux puissances, associées et confondues, formaient une puissance presque surhumaine à laquelle l’âme et le corps étaient également asservis (Fustel de Coulanges). L’avènement du catholicisme entraîne la division du pouvoir temporel et du pouvoir spirituel. Mais non sans que des luttes ardentes soient intervenues pour mettre les choses au point. Toute la théorie de l’Église catholique sur l’étendue de la puissance ecclésiastique se formule à l’occasion de la querelle des investitures. Actuellement tous les États chrétiens proclament l’autonomie du pouvoir civil et garantissent la liberté de conscience, bien que certains d’entre eux se soient subordonné l’Église (Russie, Grèce, Roumanie, Serbie, Bulgarie), et que d’autres se disent encore des États catholiques (Espagne, Autriche-Hongrie). De véritables théocraties subsistent aussi : les empires mahométans de Turquie et du Maroc et le gouvernement bouddhique du Grand Lama du Thibet.

2. La religion catholique a eu deux sortes de luttes à supporter :

  1. Abbé Savoye, De l’origine de quelques idées modernes, p. 81.
  2. Les Suisses du canton de Vaud aiment à dire : « Le prêtre c’est comme la pompe à incendie : on n’aime pas à s’en servir, mais on tient a savoir qu’elle est là. »