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« coefficients internationaux » expression de la force réelle des États qu’il s’agit de transformer en puissance de vote[1].

204. Les principes sociaux.


1. Les principes au point de vue de la théorie et de la spéculation sont les propositions élémentaires et fondamentales qui servent de base à un ordre de connaissances ; au point de vue de la pratique ce sont les règles fondamentales de conduite, exprimées souvent sous la forme de maximes. C’est un besoin de la vie collective de condenser les idées sous la forme de principes. Elles agissent ainsi puissamment sur les esprits et ce sont eux qui, consciemment ou inconsciemment, font l’objet de discussions, ici dans les cercles familiers, là dans les assemblées publiques. Toute politique tend à devenir rationnelle, c’est-à-dire basée sur des principes.

Les faits extérieurs apparents ne sont que les conséquences de causes qui influent d’une manière indéniable sur toute la trame des destinées humaines. Partout des principes généraux sont en jeu : les événements en sont l’application à des cas particuliers. Dans la guerre présente, par exemple, les dirigeants des peuples pourraient-ils imposer de si lourds combats s’il ne s’agissait pas d’une guerre de principes. Autre exemple emprunté au moyen âge : la formidable querelle des Universaux qui retentit à travers plusieurs siècles n’offre pas seulement un intérêt philosophique ; elle touchait au drame de l’histoire dans une société fondée alors sur la foi. La conception de l’homme et de la fin humaine, celle du pouvoir et de la société, avaient leurs attaches profondes dans les principes, mis en jeu par cette querelle qui eut une durée et une vivacité extraordinaires.

2. la nature et les fondements des principes sociaux donnent lieu à quelques remarques. Ces principes ne sont que des généralisations de faits particuliers[2]. Leur fondement ne doit avoir rien de métaphysique. Tour être admis de tous, dans nos sociétés à liberté de conscience et d’opinion, ils ne doivent présupposer aucune doctrine, aucune philosophie, aucune théodicée. Ils doivent partir de ce qui est réel, positif, connaissable ; libre à chacun d’ajouter ses conceptions et ses croyances aux motifs d’adhésion unanime, démontrables et vérifiables selon l’expérience de la vie courante ; libre aussi d’y surajouter des motifs puisés dans son sentiment personnel. D’autre part, dans la chaîne des raisonnements, des inductions et des déductions il n’est

  1. Voir ci-après n° 334. Voir aussi les travaux de l’Institut international de statistique et ceux de l’Institut international d’agriculture sur l’indice unitaire du blé. — C. Henry, Sur les principes d’analyse statistique (Bruxelles, Institut de sociologie). — Sur la méthode dans les sciences sociales, voir J. Durieux et Descamps dans les Documents du Progrès, mai 1910 et sept. 1913.
  2. On peut comparer un principe général à un passe-partout, qui ouvre toutes les portes d’une maison et résume en lui vingt clefs particulières.