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DOCUMENTS BIBLIOGRAPHIQUES

Souvent des maîtres ayant professé leurs cours à l’université ne l’ont pas publié, mais ils en laissent des notes. Et d’autre part, il se trouve que certains de leurs élèves ont transcrit ces cours à l’audition orale et que l’un d’eux, s’aidant de notes et de transcriptions, en fasse la publication d’un livre (ex. : Histoire de l’Église, par J. D. Maehler, publiée par le R. P. Gams).

Le traité didactique exige des explications orales. Il n’est donc pas complet par lui-même, ce complément étant laissé au maître.

On a employé parfois la forme d’un ouvrage général, s’adressant au grand public instruit, et celle des rapports complémentaires renfermant des études techniques s’adressant aux spécialistes. (Ainsi J. Murray et J. Hjort : The Depth of the Ocean, London 1912, relatif à la campagne océanographique du Michael Sars dans l’Atlantique).

Certains traités consacrés à une science sont accompagnés du sommaire d’une science auxiliaire. (Ex. : Louis Roule, Traité raisonné de la pisciculture et des pêches. À la 2e partie est jointe un sommaire d’océanographie).

Quand la matière auxiliaire est très importante pour un ordre d’étude, il en est fait un traité propre. Ex. : Traité de zoologie médicale.

Des ouvrages de grande étendue ont été résumés. D’autres ont été condensés (ex. : Le système de politique positive de A. Comte a été condensé par Ch. Cherfils, Paris, Girard, 1912). Le plan et dans la mesure du possible la lettre du texte ont été respectés jusqu’au scrupule. La Philosophie positive a été condensée par Miss Martineau.

d) Traité synthétique. — Il semble aujourd’hui que les traités sont l’expression des grandes synthèses scientifiques. Qui veut reconstruire l’architecture de l’ensemble d’une science compose un traité. Et les ouvrages de cette espèce sont essentiellement de grandes architectures d’idées. Il ne s’agit pas de procéder par élimination ou élagage, ce qui en ferait un simple schéma, mais de s’arrêter à l’essentiel.

Les traités peuvent se contenter de résumer en un chapitre ce qu’ont dit les auteurs qui ont traité chacun fragmentairement du sujet, à un point de vue particulier ; mais autre chose est utiliser tous ces éléments synthétiquement et substituer des notions coordonnées à des notions autrement décousues. Mais en réunissant en une même étude de l’objet étudié ce qui n’a été souvent vu que séparément chez plusieurs, parfois assez éloignés les uns des autres, on s’expose naturellement à établir des connexions plus ou moins inexactes, à réunir des dispositions exclusives l’une de l’autre, etc. Il faudrait avoir approfondi tous les groupes d’objets par des études personnelles pour éviter sûrement ces écueils. C’est impossible. Force est donc d’admettre les inconvénients de la méthode et de chercher ultérieurement à les corriger.

À côté ou au-dessous des travaux d’érudition, il faut à toute science des exposés synthétiques, oraux ou écrits. Dans des pareils exposés, les idées générales sont nécessairement au premier plan, les faits au second, alors qu’au contraire, dans l’enseignement érudit, il faut, comme disait Fustel de Coulanges, une année d’analyse pour autoriser une heure de synthèse. (Salomon Reinach.)

Ouvrages d’introduction. — Il faut attacher le plus grand prix aux ouvrages considérés par leurs auteurs à faire prendre en quelque sorte par chaque science la conscience d’elle-même. Pour les mathématiques, Pierre Bontroux a réalisé œuvre semblable dans Les principes de l’analyse mathématique, exposé, historique et critique (2 vol Herman, 1914 et 1919) et dans L’idéal scientifique des mathématiques dans l’antiquité et dans les temps modernes (Paris, Alcan). L’auteur utilise l’étude approfondie qu’il a faite de l’évolution de la pensée mathématique pour écrire un traité dont on a dit qu’il était l’initiation la plus directe et la plus substantielle qu’on puisse souhaiter tout à la fois et indivisiblement à la science, à l’histoire et à la philosophie des mathématiques. Cet ouvrage soulève le problème du devenir de la science mathématique et il en dégage la mission actuelle des mathématiciens.

e) Naissance de nouvelles formes. — On voit à un moment donné naître de nouvelles formes de traité et elles sont intimement liées à la conception même que l’auteur se fait de la structure même de la science.

Ainsi, dans les sciences naturelles, on a longtemps publié des traités dits de zoologie et d’anatomie comparée où l’on trouve le sujet traité de la manière suivante : Le règne est divisé en grandes sections qui sont étudiées séparément. Par ex. : Mollusques. Le chapitre commence par des généralités sur le groupe ; c’est une anatomie comparée des mollusques dans laquelle on expose la variation des fonctions et des organes dans ce groupe, tel qu’on ferait au chapitre Mollusques dans un traité d’anatomie comparée tel qu’on le comprenait autrefois. Puis on annonce que le groupe se divise en tant de classes et immédiatement on aborde leur étude, on les examine séparément les unes à la suite des autres. Prenons celle des Gastéropodes. On les traite comme on fait de l’embranchement des mollusques, puis on passe à la sous-classe, de l’ordre au sous-ordre, sans se préoccuper des animaux qui possèdent les organes toujours de la même manière et alors on change brusquement de plan. On entre dans la zoologie pure. On décrit les familles, les genres principaux voire les espèces, mais sans en faire connaître autre chose que les caractères presque exclusivement extérieurs qui les distinguent et qui sont suffisants au but de la zoologie qui est de nommer et de classer.

Ce n’est là ni de la zoologie ni de l’anatomie comparée, mais des chapitres d’anatomie comparée emboîtés les uns dans les autres et dont le dernier de chaque groupe contient un chapitre de zoologie pure.