Page:Otlet - Traité de documentation, 1934.djvu/222

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
243
217
SUBSTITUTS DU LIVRE

nouveaux permettent d’atteindre les résultats que recherche le livre (information, communication), en mettant en œuvre d’autres moyens que lui. Mais il y a là aussi élaboration acquise, recherchée ou entrevue de nouveaux types de documents. À ce double titre une place importante doit leur être faite dans la Documentation. C’est à défaut d’un nom commun pour les désigner, qu’un terme collectif, provisoire peut leur être appliqué : les substituts du livre. Mais ces substituts ne sont pas de simples « Ersatz ». Ils se produisent avec une telle puissance et un si irrésistible courant que dans leur effet ils font penser à ce qui se passe dans le domaine des communications matérielles. Le déjà séculaire chemin de fer voit l’auto et l’avion lui disputer le champ qu’il avait, il y a dix ans encore, en quasi exclusivité. Après que la pensée en a trouvé le moyen, par l’écriture ou le dessin et par le papier, de se fixer en substance constituant support, la voilà qu’elle fait un retour en quelque sorte à ses origines, la parole même et qu’elle s’incorpore en des phénomènes qu’un immense appareillage nouveau permet de produire

b) La documentation auditive et sonore prend sa place à côté de la documentation visuelle et graphique. C’est le vaste domaine de la parole, de la musique et du signal par le son, soit d’expression directe et présente, soit retardée ou conservée (phonogramme), soit encore d’expression transmise à distance (téléphone, T. S. F.).

Au document écrit s’oppose la tradition orale. Il y a des traditions poétiques, religieuses, symboliques, historiques ; et aussi des traditions scientifiques et techniques. Beaucoup de données scientifiques ne sont pas écrites ; beaucoup de procédés opératoires se transmettent de patron à ouvrier, d’homme à homme. On a quelquefois parlé de livre visible, livre audible, livre tangible (taillé).

c) De toute manière la documentation n’est qu’une des branches d’une classe plus générale : les moyens d’Information et de Communication. Il est d’autres modes de communication de la pensée que le document et c’est d’eux qu’il va être question maintenant. Ces autres modes sont ou complémentaires de la documentation proprement dite ou établis en association avec elle.

Le livre n’est qu’un moyen ; ce n’est pas un but. D’autres moyens existent et peu à peu ils rendent mieux que le livre et s’y substituent. Ainsi : les expositions universelles remplacent avantageusement les traitée de géographie ; l’histoire est connue du grand public par les opéras ; les musées attirent l’attention sur les sciences.

243.1 Objets. Matériel de démonstration.

1. Notion.

a) Le document écrit ou graphique est la représentation des choses matérielles ou des images intellectuelles et abstraites des choses. Les choses matérielles elles-mêmes (objets) peuvent être tenues pour documents lorsqu’elles sont érigées comme éléments sensibles, directs d’études, ou de preuves d’une démonstration. Il s’agit alors de « documentation objective » et de « documentation automatique ».

b) Les objets de toute espèce donnent lieu à des collections. Ainsi les objets naturels : minéraux (éléments et composés chimiques, roches), plantes (herbes, bois, racines) animaux (anatomie, tératologie). Ainsi les objets créés par l’homme : matières, produits, objets techniques.

Il y a les préparations et coupes micro— et macroscopiques.

Il y a toutes les collections de l’archéologie qui repose sur des œuvres matérielles, œuvres qui se divisent elles-mêmes en artistiques, quand elles ont un caractère monumental ou esthétique et techniques dans le cas contraire.

Les reliques sont des parties du corps d’un saint personnage, soit des objets ayant été à son usage ou ayant servi à son supplice, que l’on conserve religieusement.

2. Espèces d’objets.

Les « objets » sont donc de cinq grandes espèces :

1° Les objets naturels ; matière et structure.

2° Les objets artificiels, créés par l’homme pour ses besoins : matière et structure.

3° Les objets qui portent des traces humaines ; ils servent à des interprétations et ont des significations.

4° Les objets démonstratifs, également créés par l’homme, mais en vue de représenter et de démontrer des notions.

5° Les objets d’art.

3. Modèles. Maquettes. Reliefs.

a) À côté de l’objet réel ou naturel, il y a l’objet reproduit, interprété ou même le nouvel objet proposé à la construction à grande échelle. C’est le modèle ou maquette (stéréogramme). Il se produit en volumes à trois dimensions, il peut être colorié, il peut aussi être mis en mouvement (articulé), soit à la main, soit à la machine (reproduction stéréo-mécanique).

b) Les modèles sont les uns scientifiques, les autres techniques.

1° Les modèles scientifiques sont établis pour des buts de démonstration. Maxwell qui conçut toujours des modèles, disait dans une adresse en 1870 à la British Association : « Dans l’intérêt des personnes douées de différents genres d’esprits, la vérité scientifique devrait être présentée sous des formes variées et regardée comme tout aussi scientifique quand elle revêt la forme robuste et les vives couleurs d’un modèle scientifique, que quand elle a la ténuité et la pâleur d’une expression symbolique. »