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SUBSTITUTS DU LIVRE


facultatif permet ou degré élémentaire, des classes d’observation ; au degré moyen, des classes de vocabulaire ; au degré supérieur, des classes documentaires.

Des instituteurs ont imaginé de placer des bons parmi les parents des élèves et de faire servir le cinéma scolaire de la semaine au cinéma récréatif du dimanche. Les 50 centimes payés alors paient la gratuité offerte aux enfants et remboursent les bons émis.

Le cinéma comme la photographie et le phonographe commence à servir aux « souvenirs vivants », le film de circonstances personnelles, familiales ou publiques dont on désire conserver la mémoire.

e) On a appliqué le cinéma à l’éducation des sourds-muets et au traitement des bègues. Le Dr Doyen l’a fait entrer dons les salles d’opération et de son aveu les projections ont servi à critiquer son art : il s’est mis à l’œuvre et a perfectionné ensuite ses propres procédés opératoires. On a proposé de faire servir les films à l’éducation des orateurs, des acteurs, des danseuses qui, pouvant s’observer eux-mêmes au naturel, peuvent ensuite se corriger.

f) L’Institut International de Cinéma éducatif a été fondé à Rome comme organisation dépendant de la Société des Nations. Elle publie une revue pleine d’intérêt.

243.37 Établissement et utilisation des films.
243.371 ÉTABLISSEMENT DES FILMS.

Progressivement se dégage une méthode pour l’établissement des diverses catégories de films.

Pour établir un bon film, il faut la collaboration : 1° d’un spécialiste fournissant les éléments ; 2° d’un didactique classant ces éléments, élaborant les scénarios ordonnés, transformant les documents en schémas animés ; 3° d’un technicien du cinéma donnant au film un aspect artistique et séduisant en y appliquant les ressources de la prise de vues et du tirage : cacces ; vus ; fondus, pour enchaîner le gros plan sur les vues d’ensemble ou les diverses parties d’une machine ou d’une opération entre elles. (F. Meyer.)

Il faut distinguer les choses organiques et inorganiques. Les inorganiques doivent être projetées au repos (simple diapositive). Dans plusieurs catégories, on peut les regarder plus longtemps (par ex. des instruments). Pour les organiques (par ex. une opération) il faut éviter de projeter des données à trop petite échelle et noyées dans les détails. C’est le schéma qui s’impose : le schéma animé.

243.372 UTILISATION DES FILMS. LES SPECTATEURS.

a) Les études de bibliologie psychologique s’appliquent au cinéma. Il y a lieu de les poursuivre dans l’action du film sur le spectateur.

b) Les écrivains autrefois lisaient. Les jeunes poètes sans conteste sont allés au cinéma voir des images mobiles sur l’écran. Le rythme rapide, c’est l’impression dominante chez les débutants d’aujourd’hui. (C. H. Hirsch)

c) Le cinéma et les névroses. — Le cinéma crée un danger par son action sur les nerveux, les anormaux et les malades mentaux. De par l’impression qu’il exerce à tout âge, grâce à la fièvre d’attirance, grâce à une mise en scène de plus en plus perfectionnée, il maintient, pendant des heures, un véritable pouvoir de suggestion, d’hypnotisme, pourrait-on dire. L’obscurité de la salle, le silence sépulcral, l’impression de sentir tous les regards rivés au même tableau, la musique tour à tour entraînante, enivrante ou enchanteresse, toutes ces circonstances réalisent mieux que ne le ferait l’institut de psychothérapie le mieux outillé, la préparation favorable à produire l’état d’hypnose et la suggestion.[1]

d) Une action est commencée de tous côtés en vue de donner à la jeunesse le cinéma qui lui convient.[2]

243.38 Point de vue moral, social, commercial.
243.381 POINT DE VUE MORAL ET SOCIAL.

a) Une triple action occulte s’exerce par le cinéma : 1° une action commerciale, exploitant les masses, leur crédulité et leurs passions ; 2° une action politique favorable à l’idéologie gouvernementale (subventions secrètes des gouvernements aux cinémas, notamment pour la production des actualités et l’entretien d’un esprit militaire et même guerrier) ; 3° une action sociale favorable à l’ordre des choses existantes et contraire aux transformations (cinéma de classe).

Il faut être sur ses gardes. Le « documentaire » n’est pas toujours un pur document. Du bourrage de crâne s’y ajoute, car le cinéaste est souvent invité à apporter au film sa foi et ses partis-pris.

b) Les gouvernements ont organisé la censure du cinéma. Elle est tour à tour orientée en fonction de cette triple action.

Pour le cinéma, on a réalisé un mode spécial de contrôle (France, décret du 20 juillet 1919 ; Belgique, loi du 1er septembre 1920). Défense de recevoir dans les cinémas publics les enfants de moins de 16 ans, sauf dans les cas où tous les films portés au programme ont été autorisés par une commission officielle de contrôle.

c) Le cinéma a une action puissante sur les sentiments de guerre et de paix. Le film de Remarque À l’Ouest rien de nouveau l’a montré.

  1. Dr V. de Ruette. — Cinéma éducatif ou cinéma démoralisateur. Publication de l’Institut International du Cinématographe éducatif, 1933.
  2. Première expérience du Ciné Mundaneum (Palais Mondial) dans les écoles et les cinémas. Voir notice explicative. — Comité de l’Enfance S. D. N. Effet du cinéma. Rapport sur les travaux du Conseil. 1926, p. 113.