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BIBLIOLOGIE

4. Le document sténographié prend une place de plus en plus importante. C’est la division du travail. Au travail de la composition littéraire se substitue celui de l’improvisation parlée, laquelle est enregistrée d’autre part par le sténographe. Tous les débats publics, dans les parlements, les conseils, les comités donnent lieu à une formidable littérature. Les méthodes du travail personnel elles-mêmes se transforment sous l’empire de la sténographie. Théodore Roosevelt a donné l’exemple de dicter à ses sténographes ses adresses et messages au Congrès, et les réponses détaillées aux lettres qui lui étaient envoyées. Depuis en Amérique, en Europe ensuite, l’usage des sténographes privés s’est considérablement développé. Ce sont les sténo-dactylographes.

5. Dans les Assemblées et Congrès, il y a une organisation permanente de la sténographie. Le service est ordinairement assumé par deux équipes de deux sténographes qui travaillent à tour de rôle 15 minutes par heure. Aussitôt après la relève, les deux sténographes se retirent pour dicter chacun à des dactylos la moitié de la prise.

6. Il existe un nombre considérable de systèmes de sténographie (Astier, Conen de Prépéan, Aimé Paris, Duployé, Meysmans, Prévost-Delaunay, Stolz, etc.).

La « Brevigraphie », inventée par Raoul Breval, utilise les lettres de l’alphabet et la ponctuation dactylographique ce qui permet de brevigraphier un discours sur une machine à écrire.

7. Sténographie mécanique. — La sténographie est devenue mécanique. D’admirables petites machines ont été inventées (notamment la Sténophile Bivort). Les avantages sont ceux ci :

Absence de toute méthode difficile à apprendre : écriture en lettres alphabétiques ordinaires, facilité d’apprentissage ; lecture possible pour tous ; fatigue nulle ; vitesse illimitée, dépassant de loin la parole humaine ; mécanique simple, légère, peu volumineuse et silencieuse ; possibilité de sténographier en toutes langues et même dans l’obscurité.

On sténographie et on relit parfaitement les langues sans en rien comprendre.

Une fable connue, composée de 70 mots, est écrite en 10 secondes, ce qui donne la vitesse de 420 mots à la minute.

8. Documentation sténographique. — L’Association internationale des Sténographes a formulé le projet de concentration en une Bibliothèque unique de tous les documents dont le caractère commun est d’être le résultat de la sténographie. (Voir les communications faites à ce sujet par M. Depoin à l’I. I. B.).

9. Problèmes. — Il y a trois degrés dans les problèmes à résoudre :

1o Une sténographie personnelle efficace ;
2o Une sténographie lisible de tous ;
3o Un seul système de sténographie.


L’écriture sténographique mentale serait plus rapide que l’écriture alphabétique, de telle sorte que la sténographie ouvrirait la voie à l’écriture et à la lecture rapide.

Il est nécessaire de :

a) formuler les desiderata de la sténographie,

b) étendre toutes les possibilités de signes,

c) établir des écritures pour juger des systèmes,

d) critiquer les systèmes,

e) combiner en un seul les avantages reconnus de tous les systèmes et les perfectionner.

Il existe un grand nombre de systèmes sténographiques. Des efforts sont tentés pour réaliser l’unité sténographique, non seulement par langue, mais même internationalement (revendications formulées par Forel et Broda).

On a déterminé qu’un tableau phonographique complet comporterait environ 150 signes.

222.163 CRYPTOGRAPHIE.

1. La cryptographie est l’art des écritures secrètes. On lui a donné divers autres noms : cryptologie, polygraphie, stéganographie, etc.

2. De tous temps, les gouvernements, les hommes d’État, les ambassadeurs, les hommes de guerre, ont utilisé ce qu’on est convenu d’appeler le langage chiffré. À cet effet, on emploie des clefs, des grilles, des livres à pages repérées, des jeux de cartes, des livres typographiques (Le Scarabée d’Or, d’Edgard Poë).

Pendant la guerre, le Bureau des chiffres à l’État-major français a été chargé de reconstituer le sens de tous les radiogrammes conventionnels.

En diplomatie, le chiffre a dû se développer parallèlement à l’usage du cabinet noir par où les gouvernements auprès desquels les ambassadeurs sont accrédités font souvent passer leur correspondance.

Des hommes de science se sont servi d’écriture secrète. Ainsi Francis Bacon usait probablement de cryptographie comme un moyen d’enregistrement scientifique de vers qu’il destinait à la postérité scientifique. Ces vérités auraient été inintelligibles pour les contemporains ou leur révélation aurait été dangereuse pour lui. (Bacon-Shakespeare. Mercure de France, 15-IX-1922.)

3. Les systèmes usités en diplomatie sont nombreux : méthode de Jules César, japonaise, par parallélogramme, de Scott, du Comte Gronsfeld, de Bacon, etc.

Les combinaisons sont à l’infini. Le déchiffrement se fait par tâtonnement, basé sur une vingtaine de règles (par ex. celle du redoublement des lettres).

4. La clef d’un chiffre est l’alphabet dont on est convenu. On en distingue de plusieurs espèces : le chiffre à simple clef est celui dans lequel on se sert toujours d’un même alphabet pour remplacer les diverses lettres d’une dépêche, et le chiffre à double clef celui où on change l’alphabet à chaque mot. On se sert en outre de nulles, syllabes ou même phrases insignifiantes, que l’on mêle aux caractères significatifs. Pour augmenter encore