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Page:Ourliac - Nouvelles.djvu/169

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Paris, mais elle venait de plus loin. Cette lettre était de Thibault. Je ne crois pas inutile de la transcrire comme un dernier trait qui achève, en la rehaussant, l’imparfaite esquisse que j’ai voulu tracer de cette figure ; j’en voulais traduire surtout la forme, les dispositions marginales et l’écriture qui est une belle ronde ferme et droite du bon temps ; dans tous les cas, elle est entre mes mains, et je l’offre de tout mon cœur à l’empressement des curieux. Je conserverai du moins l’orthographe.

L’adresse est écrite et conçue ainsi qu’il suit :


À Monsieur
B… Joseph, Rentier,
À Paris
(Seine).

Aigues-Mortes 25 novembre 1839.
Mon très-Cher et Vraix Ami,

Je trouve Enfin l’Occasion de te faire savoir de mes nouvelles ; depuis dix ans que je quittai Paris, que je quittai l’ami intime de mon Cœur, le contemporin avec qui j’ai fait mes farces modestes, l’ancien voisin, le Compagnon avec qui j’ai passé tant d’agréables momens, Enfin l’objet qui a tant de fois dissipé mes Chagrins et ma mélancolie ; toi qui m’as sorti d’Embarras de l’auberge ou je descendis, pour me loger à cotté de toi, chez Mme Maréchal d’où j’avais tous les jours occasion de vous voir, ou nous alions Ensemble au Palais Royal jusqu’à la nuit. Ces agréables instans ne Reparoitrons plus, je n’aurai jamais plus le bonheur de t’Embrasser de te presser Etroitement contre mon cœur Palpitant d’Allégresse ; tressaillant de Plaisir mais d’un plaisir Parfaitement pur, puisqu’il n’est fondé sur aucun poin d’intérêt que sur un attachement amical, sur cette noble Raison qui est Si rare dans ce Vilain Ciècle, ou on ne trouve qu’amis d’argent pu de bouche !

Je désire Ardament que la présente te trouve en Bonne santé ainsi que Dame ton Épouse, ton Cher fils l’aimable Augustin, et