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Page:Ourliac - Nouvelles.djvu/19

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L’invalide laissa retomber la double porte qui lui aplatit son chapeau sur la nuque, et nos gens de rire quand ils furent seuls. L’heure de la sortie était passée, mais on ne regretta point ce temps perdu, et bientôt le bureau fut vide.

Le lecteur s’est bien trompé s’il a cru, comme moi, qu’il s’agit ici d’un conte pour rire ; cette histoire est effroyable, elle dévoile des plaies hideuses de l’âge présent. Que n’ai-je le temps d’en exprimer la morale ! Courage, pénétrons dans ce récit étrange.

Huit jours après cette scène au ministère de la guerre, dans la mairie du 10e arrondissement, située, s’il m’en souvient rue de Grenelle, les bureaux de l’état-civil se trouvaient encombrés de personnes que divers événements de famille y amenaient dans un pêle-mêle bien philosophique. On y voyait des Cauchoises surmontées de bonnets de trois pieds d’envergure, qui berçaient des nourrissons en chantant, des hommes en habit noir qui riaient, et d’autres hommes en habit noir qui pleuraient. On entendait à la fois la voix rauque des employés, le grincement des plumes, le froissement des papiers, des vagissements d’enfants, la toux des vieillards et les cris affairés des garçons de bureau.

— Que voulez-vous ? dit un commis à une Cauchoise.

— Monsieur, c’est un baptême, dit la femme en fausset.

— Passez là-bas au grillage vert. — Et vous ?

— Monsieur, c’est un décès, dit un homme avec un sanglot.

— Vous pouvez attendre. — Et vous ? demanda le commis au personnage qui demeurait seul.