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où restait une chambre dont on n’avait pas besoin, il eut le médecin de la famille et les remèdes qu’exigeait sa maladie. Madame Lanoue montait vingt fois le jour pour veiller à ce qu’il ne lui manquât rien. Elle mettait plus souvent la poule au pot, afin qu’il eût toujours de bon bouillon. Elle lui procurait des livres qu’il n’avait pas la force de lire, et les douceurs qui conviennent à un malade. Elle le fournissait de linge, d’autant plus méritoire en ces soins maternels qu’elle en avait mille peines, qu’elle prenait sur ses épargnes et se cachait de son mari, lui faisant entendre que cela ne coûtait rien, et qu’il ne fallait point se priver d’une bonne action à si bon marché.

Ce dernier était un brave homme, mais bourru et incapable de ces délicatesses. Cette maladie lui semblait bien longue ; il se récriait de temps en temps sur ce qu’on ne connaissait pas bien ce jeune homme, qui ne méritait peut-être pas tant d’égards. Il découvrit bientôt que sa femme passait de longues heures auprès de lui, et, comme dans sa maladie Jacques conservait une physionomie touchante qui avait je ne sais quoi de remarquable, il craignit sans doute que sa femme ne finît par y prendre trop d’intérêt. Il n’osa, pas toutefois lui en parler, rougissant lui-même de ses appréhensions ; car elle ne lui avait jamais donné le moindre sujet de plainte ; mais, un jour, n’y tenant plus, il saisit le moment où elle était en provision, et monta dans la chambre du malade. Jacques était dans un accès de fièvre. Le tapissier lui expose la gêne qu’il occasionne, et l’engage à demander lui-même de quitter la maison. Jacques l’entendit sans doute, mais il n’eut pas la force de répondre, et tomba dans un profond évanouis-