Page:Ourliac - Nouvelles.djvu/320

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

suis pas en état d’en juger… mais parce que j’ai pour vous une estime particulière… et puis aussi parce que ce matin… vous souvenez-vous ?… ce matin… il vous est venu une pensée excellente, un mouvement de charité…

— Vous êtes bien bon, interrompis-je avec timidité.

— Vous n’y êtes pas ? reprit-il… Ce matin… dans cette grande allée qui mène… devant une image…

— Ah ! m’écriai-je, en me rappelant ma pancarte et mes réflexions sur le triste diable qu’on y avait peint.

Je ne laissai pas d’être étonné que mon interlocuteur fût si bien instruit d’une pensée que je ne me souvenais point avoir communiquée à personne dans le cours de la journée.

— Oui, reprit-il, vous êtes un brave homme, et vous avez entrevu la vérité sur mon compte par un effort de compassion : c’est la première fois que cela m’est arrivé. Ah ! que les bons cœurs font les grands esprits ! Je vous dirai donc, pour vous rassurer au plus tôt, que je m’appelle dans le monde M. Perdriel ; je demeure rue Vanneau, no 39.

— Dans ma rue.

— Précisément. Et voilà ce que je suis, du moins en apparence…

— Comment diable ! dis-je ; mais qu’êtes-vous en réalité ?

— Vous auriez peut-être peine à le croire… J’aurais voulu vous préparer…, et j’aimerais mieux vous dire ce que je ne suis pas… ; car je ne suis pas un homme comme vous.

— Ni une femme, apparemment ?