Page:Ovide - Œuvres choisies (trad. Panckoucke), Les Amours, 1858.djvu/341

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n’arrête tes baisers, et que ses lèvres desséchées s’humectent de tes larmes. Fais des vœux pour sa santé ; surtout fais-les à haute voix ; et, au besoin, sois toujours prêt à lui raconter des rêves d’un heureux présage. Fais venir, pour purifier son lit et sa chambre, quelque vieille femme dont les mains tremblantes porteront le soufre et les oeufs expiatoires : son âme gardera le souvenir de toutes ces attentions. Que de gens obtiennent par de pareils moyens place dans un testament ! Mais prends garde, par des complaisances trop empressées, de te rendre importun à la malade : ta tendre sollicitude doit avoir des bornes. Ce n’est pas à toi de lui défendre les aliments ou de lui présenter un amer breuvage : laisse ce soin à ton rival.

Mais le vent auquel tu as livré tes voiles en quittant le port n’est plus celui qui te convient quand tu vogues en pleine mer. L’amour est faible à sa naissance ; il se fortifiera par l’habitude : sache l’alimenter, et avec le temps il deviendra robuste. Ce taureau que tu redoutes aujourd’hui, tu le caressais quand il était jeune ; cet arbre à l’ombrage duquel tu reposes ne fut d’abord qu’un faible scion. Mince filet d’eau à la source, le fleuve s’augmente peu à peu, et, dans son cours, se grossit